• Mon Dieu, lorsque je regarde le ciel, il m'arrive parfois de me demander pourquoi Tu lui as donné la couleur bleue.
    Dans ces moments-là, pour tenter de trouver une réponse à ma question, j'essaye de pénétrer les pensées qui étaient les Tiennes au moment où Tu as créé le monde.
        
    Tu aurais pu créer le ciel jaune…
    Mais c'était déjà la couleur du soleil. Et ce dernier aurait été moins visible si l'espace qui l'entourait avait été de la même couleur que lui.
    Or, il était nécessaire que le plus grand astre de l'univers puisse se détacher du reste.
    En effet, dans la symbolique chrétienne, le soleil Te représente, mon Dieu. Sa place centrale devait donc être mise en évidence.
        
    Tu aurais pu le créer rouge…
    Mais comment le ciel, qui est le lieu de la joie, de l'amour et du bonheur éternels, pouvait-il avoir la couleur du sacrifice ?
    Le rouge, mon Dieu, semble plutôt destiné à la terre.
    En effet, c'est la couleur de la Passion. Celle de Ton Fils, et, aussi, celle de Tes saints martyrs.
    Au ciel, par contre, tout est paix, tout est pureté. Il n'y a pas de violence.
    Le rouge n'était donc pas la couleur qui pouvait nous rappeler le mieux cette virginité originelle.
        
    Tu aurais pu le créer orange…
    Cela aurait été très beau, c'est certain. On aurait eu l'impression qu'un gigantesque "incendie d'amour" embrasait tout, au-dessus de nos têtes.
    Mais peut-être as-Tu voulu quelque chose de plus doux, de plus reposant, de plus apaisant, pour l'homme.
    C'est pourquoi la couleur orange n'apparaît que très rarement, dans le ciel.
    Généralement, c'est au lever ou au coucher du soleil; et seuls ceux qui gardent leur lampe allumée peuvent assister à ce spectacle féerique !
        
    Tu aurais pu le créer vert…
    Cependant, dans Ton infinie sagesse qu'aucune créature ne pourra jamais pénétrer, Tu as préféré réserver cette couleur aux pâturages.
        
    Tu aurais pu le créer violet…
    Cela t'aurait également été possible. Mais peut-être était-ce là une teinte un peu trop sombre qui n'aurait pas permis à la terre d'être suffisamment "lumineuse".
    Peut-être même notre chère planète nous aurait-elle semblé "endeuillée", sous un ciel violet.
    Or, Toi, mon Dieu, Tu souhaites que nous vivions dans la joie notre temps d'exil ici-bas.
        
    Tu aurais pu le créer marron…
    Toutefois, Tu as choisi là encore de réserver cette couleur à d'autres éléments de Ta création : la terre, les déserts, les rochers, les montagnes… Les couleurs sombres, mon Dieu, Tu T'en sers généralement pour le monde dans lequel nous vivons.
    Et s'il est vrai que, la nuit, Tu permets quand même que le ciel soit noir, c'est uniquement parce que cela fait apparaître la lune et les étoiles grâce auxquelles les voyageurs que nous sommes peuvent s'orienter.
        
    Tu aurais pu également le créer blanc...
    Mais si tel avait été le cas, mon Dieu, comment aurions-nous pu voir les nuages ? Cela nous aurait été totalement impossible !
    Et pourtant, les nuages jouent un rôle essentiel, dans nos vies !
    En effet, ils stimulent notre imagination en faisant défiler devant nos yeux ébahis des formes toutes plus incroyables les unes que les autres.
    Non, vraiment, il fallait que l'homme puisse voir les nuages pour apprendre à rêver. Cela était nécessaire !
        
    Mon Dieu, dans Ton infinie sagesse, Tu as donc voulu que le ciel soit bleu.
    S'il en a été ainsi, ce n'est sûrement pas parce qu'il ne Te restait plus aucune couleur sur Ta palette d'artiste. Oh, sûrement pas !
    Tu es tellement grand et tellement puissant que Tu aurais pu inventer beaucoup d'autres nuances ! Beaucoup d'autres encore !!
    Alors, pourquoi bleu ?
    Peut-être est-ce tout simplement parce que Tu as voulu que le voile qui enveloppe la terre ait la couleur des yeux de Ta Mère.
    Ainsi, Tu savais que tu pourrais rappeler aux hommes de toutes les générations qu'ils sont en chemin, ici-bas, et que, pendant ce temps souvent douloureux qui doit les conduire à la sainteté, une Mère aimante les couve sans cesse du regard; une Mère qui n'a d'autre désir que celui de les enfanter spirituellement dans son sein.


  • Nous sommes en été, en fin de journée. La chaleur de l'après-midi (une véritable fournaise !) commence à laisser place à la douceur du soir. Deux femmes marchent extrêmement lentement dans le petit jardin d'un hôpital parisien.
    La première, âgée d'une soixantaine d'années, très affaiblie, est la mère de la seconde. Les yeux cachés derrière des lunettes noires, elle s'appuie douloureusement sur sa fille pour ne pas tomber.
    Les deux femmes sont obligées de rester ainsi, serrées très fortement l'une contre l'autre, pour que celle qui est malade puisse trouver un appui et avancer.
        
    Ce qui est arrivé à la mère est très dur à raconter.
    Il y a un an de cela, elle a été victime d'une terrible agression. Une agression d'une violence inouïe.
    Une personne s'est jetée sur elle et l'a blessée très grièvement à plusieurs endroits : de nombreux coups de pieds lui ont été donnés dans les jambes et dans les côtes, trois doigts de sa main droite ont été complètement retournés pendant l'attaque, elle a eu des fractures et des contusions multiples au corps et à la tête, son épaule droite a été démise…
    Comble de la sauvagerie, son œil gauche est en partie sorti de l'orbite, tellement l'acharnement a été grand.
    Il aura fallu tout le savoir-faire d'un excellent chirurgien pour qu'il ne soit pas définitivement perdu.
    -"C'est un véritable miracle que vous soyez encore en vie", lui ont dit les membres de l'équipe médicale après la première opération. "Surtout à votre âge, car les os sont beaucoup plus fragiles".
        
    Oui, il arrive parfois que le monde dans lequel nous vivons bascule dans la violence la plus abjecte. Il y a des moments où satan, profitant de la paresse spirituelle de l'homme, parvient à s'infiltrer en lui et à l'agiter si fortement que l'être humain, emporté par le tourbillon de ses passions, devient plus dangereux qu'un cyclone. Et, si l'homme ne reste pas sur ses gardes, cela peut arriver aussi à des personnes qui sont en apparence très calmes.
        
    Heureusement, cette chère maman s'en est tirée. Oui. Grâce aux nombreux soins qui lui ont été prodigués et grâce à Dieu.
    Et même s'il est vrai qu'il faudra encore beaucoup, beaucoup de temps avant que tout rentre dans l'ordre, elle est désormais hors de danger.
    Maintenant, elle réapprend peu à peu à vivre, et ceci avec l'aide de sa fille; sa fille unique qu'elle aime tant et sans laquelle elle serait seule au monde. Ah ! Que ferait-elle sans elle, sans sa présence, sans l'attention qu'elle lui porte, sans cet amour immense qui la comble ?! Depuis cet épisode tragique, elles n'ont jamais été aussi proches l'une de l'autre.
    Avançant péniblement dans le petit jardin de l'hôpital, elles portent cette lourde croix ensemble, avec courage; parfois en se souriant doucement, parfois en versant quelques larmes.
        
    En voyant cette maman fragile réapprendre difficilement à marcher et à être heureuse (car les blessures intérieures sont elles aussi très profondes), les gens ne peuvent pas se douter que cet authentique miracle n'est pas simplement le miracle d'une guérison, mais, également, le miracle d'une réconciliation. Et ce dernier, croyez-le bien, est infiniment plus spectaculaire et plus bouleversant que le premier.
        
    Pour qu'ils puissent s'émerveiller de ce prodige, il faudrait que les gens sachent (mais cela restera à jamais un secret entre les deux femmes) que, douze mois plus tôt, la mère a été agressée par sa propre fille.