• VIII-L'EGLISE DE LA RENAISSANCE : L'EFFONDREMENT DE LA PAPAUTE ET DES ORDRES MONASTIQUES (du XIVe au XVIe siècle)

    L'Eglise de la Renaissance se laisse entraîner dans les fêtes, le luxe, l'enrichissement... et ceci sans que l'on assiste à une réaction immédiate de la part des papes et des grands ordres religieux (comme au temps de la réforme grégorienne des XIe, XIIe et XIIIe siècles). Plusieurs raisons expliquent cela :
        
    1-Aux XIVe, XVe et XVIe siècles, les papes sont extrêmement fragilisés et il n'y a pas vraiment de continuité dans leur action.
    En effet :
    a)-en 1303, pour fuir l'Italie alors très instable, ils trouvent refuge à Avignon.
    Là-bas, malheureusement, leur marge de manoeuvre est réduite car ils deviennent plus ou moins les "vassaux" des rois de France (on parle même d'une nouvelle "captivité à Babylone").
    b)-après leur retour à Rome (en 1377), un autre problème survient : un groupe de treize cardinaux décident de remplacer Urbain VI (qui est cruel et autocratique) par Clément VII (qui, lui, retourne s'installer à Avignon).
    Dès lors, l'Eglise est dirigée par deux papes : c'est le "grand schisme d'Occident". En 1409, la curie romaine croit régler le problème en élisant Alexandre V, mais les deux "anti-papes" (c'est ainsi qu'on les nomme) refusent d'abdiquer... si bien que l'on se retrouve tout à coup avec trois pontifes !
    Ce problème affaiblit considérablement l'Eglise et n'est résolu qu'en 1417 (année de l'élection de Martin V).
    c)-suite à ces événements, il y a également de fortes pressions épiscopales pour mettre les papes sous la tutelle d'un Concile oecuménique (afin de mieux les diriger).
    Le projet échoue, mais ces pressions nuisent à leur autorité et à leur image.
    d)-enfin, ces siècles voient aussi l'arrivée de très mauvais pasteurs : Alexandre VI Borgia (1492-1503) est un "prince" plus qu'un pape (il a des enfants); Jules II (1503-1513) fait la guerre; Léon X (1513-1521) est un génie artistique mais il accorde le droit d'investiture à François Ier (en 1516)...
    L'Eglise, vous le voyez, est difficilement réformable dans ces conditions !
        
    2-En ce qui concerne la fragilité des ordres religieux, elle est due à plusieurs choses :
    a)-la peste noire a fait de très nombreuses victimes parmi les moines et les moniales (au monastère des dominicains de Montpellier, par exemple, il ne reste plus qu'une seule personne !).
    Le clergé régulier n'est donc plus aussi puissant qu'avant !
    b)-les premiers grands groupements (Cluny, Cîteau...) s'éteignent progressivement (un peu comme le premier étage d'une fusée qui se détache, après le décollage de cette dernière, pour faciliter la mise en orbite).
    Ces "moteurs" ne sont donc plus là pour "propulser" l'Eglise.
    c)-on assiste également à un "relâchement" quasi-général des ordres mendiants.
    Ce phénomène, qui peut paraître surprenant, vient en fait de ce que la religion fonctionne un peu comme la vie de couple : le "feu" du départ ne brûle pas toujours de manière égale, au fil du temps (les pères du désert parlaient "d'acédie", au sujet des religieux).
    Les ordres monastiques connaissent donc eux aussi des périodes de creux et des nuits mystiques. C'est quelque chose de normal.
    Sachant cela, on comprend mieux leur attitude.
        
    3-Enfin, trois derniers points concernant les prêtres :
    a)-à l'époque, il faut savoir que les candidats au sacerdoce ne sont pas sélectionnés (il n'y a pas de temps de réflexion, de discernement, de retraite...).
    N'importe qui peut devenir un ministre ordonné. Dans certains diocèses, on en compte même des milliers !
    b)-de plus, les prêtres ne sont pas formés. C'est là un problème très sérieux.
    Les séminaires, en effet, n'existent pas (il faudra attendre le Concile de Trente, pour cela).
    c)-enfin, il y a des "déformations intellectuelles" qui se diffusent dans l'Eglise (d'autant plus facilement que la formation est inexistante !) :
    -le nominalisme (c'est une scolastique décadente qui naît dans les universités.
    Elle donne une vision du monde complètement déstructurée et fait d'énormes ravages chez les théologiens).
    -l'humanisme (ce courant n'est pas mauvais en soi, mais il laisse entendre que l'avenir ne passe pas forcément par le christianisme).
    Nous voyons donc bien que le clergé séculier n'est pas en mesure, lui non plus, de reprendre l'Eglise en main.
        
    L'un des problèmes majeurs, à cette époque, est la FORMATION.
        
    (à suivre)