• 10 POINTS POUR MIEUX COMPRENDRE LES PROBLEMES RENCONTRES PAR LES CATHOLIQUES EN BOSNIE HERZEGOVINE

    Compte-rendu d'une interview accordée par le cardinal Vinko Puljic – archevêque de Sarajevo – au journal "Famille chrétienne" en mars 2006.
        
    1-Depuis la fin de la guerre (1992-1995), la Bosnie Herzégovine est en paix et 6500 militaires de l'Eufor veillent sur le pays (ils traquent des criminels de guerre, soutiennent les forces de sécurité locales…).
        
    2-Selon les termes des accords de paix de Dayton (qui ont été signés en 1995), la Bosnie est divisée en deux entités : la Republika Srbska (à majorité orthodoxe) et la Fédération croato-musulmane (les croates, qui sont catholiques, y sont minoritaires, et les musulmans majoritaires). Le tout est chapeauté par un Haut Représentant (l'allemand Christian Schwarz-Schilling) qui arbitre en dernière instance et coordonne les actions de la communauté internationale.
        
    3-La guerre a laissé un terrible héritage d'amertume, de soupçon et de crainte dans la population. Le cardinal Puljic visite beaucoup les prêtres et les paroisses pour les stimuler. Il cherche aussi à renforcer l'espérance des fidèles.
        
    4-Les autorités civiles et internationales ne font pas assez pour les catholiques (qui sont minoritaires), et ces derniers n'ont pas des droits égaux à ceux des autres communautés. Avant la guerre, il y avait 820 000 catholiques en Bosnie. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 460 000. Sur le diocèse de Sarajevo, 600 bâtiments ecclésiastiques ont été détruits ou endommagés. Les ruines physiques sont réparées graduellement, mais la guérison du cœur humain est un processus de longue haleine.
        
    5-Peu de réfugiés croates (et, donc, catholiques) sont revenus en Bosnie car ils n'ont pas assez d'argent pour reconstruire leurs maisons. Quelques fonds ont été débloqués, mais il n'y a pas vraiment de volonté de les aider de la part des autorités civiles. Par contre, les autres communautés ont été beaucoup plus soutenues.
        
    6-La Bosnie Herzégovine représente un concentré d'Europe sur un petit territoire. Ici, l'intégration européenne est à l'épreuve. Si elle réussit, l'Europe réussira. Si elle échoue, l'Europe échouera.
        
    7-Des progrès ont été accomplis, en 10 ans, mais ils sont très lents et il y a quelques faux-pas. Par exemple, le Haut Représentant ignore les Croates parce qu'ils sont plus faibles que les Serbes et les Bosniaques. A Caplina (une ville à majorité catholique), les musulmans ont reçu l'autorisation de construire une mosquée en seulement six jours. Par contre, cela fait huit ans que le cardinal Puljic demande l'autorisation de construire une nouvelle église à Sarajevo, et il ne l'a toujours pas reçue. La liberté de conscience - dit le cardinal - la liberté religieuse, ce n'est pas une grâce que l'Etat nous fait mais c'est un droit naturel de chaque personne, que l'Etat doit garantir.
        
    8-Ce qui est effrayant, aujourd'hui, c'est l'apathie de la population. Il y a un très grand nombre de suicides et l'abstention est très forte au moment des élections. La démocratie a été introduite ici de manière non démocratique, et cela a tué la bonne volonté des gens.
        
    9-Il est nécessaire de dialoguer avec les autres religions car, bien que la guerre n'était pas un conflit religieux, des hommes politiques ont manipulé la foi de leurs concitoyens. En même temps, pour bien dialoguer, il faut que les droits soient égaux.
        
    10-Il faut respecter l'Islam et, d'une manière générale, ce qu'il y a de sacré pour les autres. Cette notion de réciprocité est importante. Mais les gouvernements européens ne mettent pas assez de pression sur les pays musulmans où des chrétiens sont persécutés, pour qu'ils puissent exercer librement leur foi.
        
    Voilà, je pense, l'essentiel de ce que l'on pouvait retenir de cette passionnante interview.