• INTERVIEW DE MARIJANA DU MOIS DE MARS 2003 ("ECHO DE MARIE REINE DE LA PAIX")

    "LE GROUPE DE PRIERE VIT DANS MON CŒUR", interview de Marijana réalisée par Stéphania Consoli (parue dans le numéro 168 du journal "L'Echo de Marie Reine de la Paix", en mars 2003).
        
    ECHO : Marijana, tant de temps est passé depuis que la Vierge te faisait entendre sa voix pour guider le groupe de prière; comment ce souvenir vit-il en toi ?
        
    MARIJANA : Pour être exacte, le groupe n'a jamais cessé, même si pendant tout un temps on a pu voir que le nombre de participants s'était notablement réduit. Une dizaine de personne continuait quand même à se réunir et à prier. Aujourd'hui, à Medjugorje, ce qui manque bien, c'est un groupe de prière pris dans les jeunes générations et guidé par un prêtre, comme le père Tomislav le faisait avec nous.
        
    ECHO : Au cours de ces dernières années tu as vécu une vie plutôt retirée pour te consacrer à ton mari et à vos enfants, même si récemment tes témoignages sont de plus en plus fréquents.
        
    MARIJANA : C'est vrai mais j'avais aussi besoin "d'absorber" la quantité et l'intensité des expériences vécues depuis l'enfance et, dans tous les cas, je sentais l'exigence de donner la priorité à ma famille, surtout dans nos premières années de vie commune. Aujourd'hui les familles vivent de façon très superficielle; le travail passe avant tout le reste; tout se fait en vitesse : on réussit à tout faire, sauf prier.
    Mais demandons-nous :  pourquoi il en est ainsi alors que la Vierge nous dit de mettre la prière à la première place ? Si nous ne donnons pas à la prière la place qui lui revient, évidemment nous ne trouvons pas le temps de prier : il faut faire ça, et puis ça… ma foi, on pourra peut-être prier demain… et finalement on ne le fait jamais.
    Que de fois Marie nous a dit de commencer la journée par la prière afin que tout se passe dans la paix et dans l'harmonie.
    Il faut prier pour que Dieu nous donne la force, le discernement, la volonté d'accueillir tout ce qui arrivera dans la journée, y compris les imprévus quotidiens fréquents.
    Si nous nous laissons accompagner par la bénédiction de Dieu, tout nous paraîtra plus facile à affronter.
        
    ECHO : Et c'est ce que vous faites dans ta famille ?
        
    MARIJANA : Oui, surtout nous prions avec les petits. Bien des fois la Vierge nous a dit qu'aujourd'hui si les familles ont des problèmes avec les jeunes c'est par manque de prière en famille. On ne peut pas prétendre qu'un jeune commence à prier à 18-20 ans s'il ne l'a jamais vu faire par ses parents ! Si seulement les parents avaient donné l'exemple, la prière serait pour lui quelque chose de tout naturel. C'est pourquoi il est important de prier avec les enfants, parce qu'ils saisissent ainsi que la prière est un moyen de communion.
    Le matin chacun de nous prie de son côté, mais le soir nous nous retrouvons toujours pour la prière en commun. Nous récitons ensemble le chapelet et facilement ce sont mes garçons qui demandent : on commence ? Je suis convaincue que si les enfants vivent cela tout petits, ils trouveront plus facilement leur vraie voie dans la vie, ayant ainsi la force d'affronter toutes les difficultés. Il me semble que cette idée claire et cette décision pour la prière en famille, je les porte en moi comme un fruit du groupe.
        
    ECHO : Quelle importance donnez-vous à la prière spontanée que la Vierge recommandait au groupe avec insistance ?
        
    MARIJANA : Effectivement dans bien des messages, la Vierge a parlé de la prière spontanée et, dès le début, les gens se demandaient ce que cela voulait dire, surtout quand ils voyaient que des enfants priaient ainsi. Cette forme de prière est recommandée par Marie surtout dans les cas où plusieurs personnes prient ensemble parce que, si j'exprime à haute voix des sentiments personnels, les autres arrivent à comprendre pourquoi il est important de prier. Exprimer publiquement ce que nous avons dans le cœur est signe d'ouverture à Dieu et au prochain. Ca n'a pas toujours été facile; surtout au début; la Vierge nous reprochait la fermeture de notre cœur. A vrai dire, nous nous taisions tous et nous n'avions pas la force de dire ce que nous vivions à ce moment. Mais peu à peu nous nous sommes habitués suivant les exhortations de Marie qui définissait la prière spontanée comme "dialogue avec Dieu".
    Elle ajoutait en outre que  la prière n'est pas une simple répétition automatique de Pater et d'Ave - comme c'est le cas du chapelet - mais qu'il faut, d'un mystère à l'autre, réfléchir et prier spontanément sur la vie de Jésus que proposent ces mystères.
        
    ECHO : Peut-on dire que c'était un des piliers de vos rencontres ?
        
    MARIJANA : C'est ce que voulait la Vierge. Elle nous a enseigné à toujours commencer et finir la rencontre avec la prière spontanée. Au début, nous exprimions librement nos intentions et, à la fin nous rendions grâces. Dans un message, Marie a dit effectivement que souvent les gens savent prier mais rarement ils savent remercier. Il faut apprendre à remercier. Il faut apprendre à remercier même pour les petites choses parce que, sans ça, nous ne saurons pas le faire pour les grandes.
    Je crois que cette méthode rendait la prière plus ouverte et plus profonde. Bien sûr, à la fin nous priions pour obtenir la bénédiction sur toute l'humanité et en particulier sur les jeunes.
        
    ECHO : Comment la Vierge guidait-elle le groupe ? Quand les messages arrivaient-ils ?
        
    MARIJANA : Généralement, la Vierge me donnait le message quand j'étais encore à la maison, avant d'aller à la rencontre. Mais il arrivait qu'elle le donne à Jelena. Je me mettais à prier et puis arrivaient ses paroles qui servaient à mettre en route la rencontre.
    A la fin elle donnait un message à Jelena, généralement plus bref avec la bénédiction finale.
    Il arrivait aussi qu'à certains moment de la rencontre Jelena reçoive un message avec un thème sur lequel échanger et partager nos impressions, après nous être divisés en petits groupes dans le but de nous ouvrir de plus en plus. A la fin un représentant pour chaque groupe transmettait les conclusions aux autres.
        
    ECHO : Je crois donc comprendre que les formes d'intervention de la Vierge changeaient suivant les circonstances.
        
    MARIJANA : Oui, ce n'était jamais un moment préétabli où elle se manifestait comme c'est le cas pour les six voyants. Le temps n'avait aucune importance, mais il faut bien souligner que les messages n'arrivaient que pendant la prière. Le père Tomislav nous a dit tout de suite que notre don était un don de prière, efficace dans la prière. La Vierge nous avait avertis que nous n'avions pas ce don pour toute notre vie, mais à vrai dire, il me semble que, dans un certain sens, le don reste en nous : même si nous ne recevons plus des messages quotidiens, ni ne sentons plus la Vierge comme avant, la prière reste un don pour toute notre vie.
        
    ECHO : Tu as des regrets ou de la nostalgie ?
        
    MARIJANA : Je pense souvent que si nous étions restés plus reliés au groupe ou mieux, à ce type de prière, si en somme tout était resté comme avant, la Vierge aurait peut-être continué à nous parler. Je le répète, je n'ai jamais cessé de prier, surtout en famille, mais c'est tout différent. Je comprends aussi qu'il existe un plan de Dieu que nous ne pouvons pas modifier.
        
    ECHO : Combien de temps deviez-vous rester ensemble pour achever votre "école de prière" ?
        
    MARIJANA : La Vierge a demandé de rester ensemble 4 ans pour nous connaître réciproquement; de cette façon ça devait être plus facile de nous ouvrir. Les gens autour de nous ne comprenaient pas et avaient de la peine à accepter; on se demandait : à quoi sert un groupe de prière ? Et pourquoi 4 ans ? Nous répondions : vous devriez venir au groupe pour comprendre. Pour quelle raison 4 ans ? Je ne le sais pas vraiment. C'était le désir de la Vierge : rester jusqu'au bout sans rien décider pour notre avenir. Il fallait simplement être présents et elle-même nous guidait par une série de messages qui sont, en un certain sens, reliés entre eux.
    Ce rappel à la constance et à la fidélité servait à éviter la mauvaise habitude qui se rencontre dans les groupes de prière : une fois, on y va; cinq fois, non. Mais comme ça on perd tout ! Si on rencontre quelqu'un et qu'on le revoit deux mois plus tard, comment créer une vraie relation ? Ce n'est pas de cette façon qu'on peut réaliser l'ouverture du cœur.
        
    ECHO : Qu'est-ce que tu conseilles à un groupe de prière qui veut vivre la prière en profondeur ?
        
    MARIJANA : Si on veut croître vraiment, un temps assez long est indispensable pour pouvoir s'ouvrir complètement en priant ensemble et en échangeant. Dans notre cas, la Vierge a voulu, au début, que nous nous rencontrions une fois par semaine, puis deux, puis trois. Elle n'a pas demandé ça d'un coup, mais peu à peu; pas à pas.
    Le troisième rendez-vous que la Gospa avait prévu, un samedi, était à vrai dire, presque exclusivement consacré au partage des expériences et des messages qu'elle nous donnait. Ces messages en effet ne sont pas égaux pour tous : chacun comprend à sa façon et, dans le partage, on peut s'enrichir de l'opinion des frères, en s'aidant les uns les autres.
        
    ECHO : On sait que la Vierge a désigné le père Tomislav comme guide du groupe. Avec quelle fréquence le rencontriez-vous ?
        
    MARIJANA : Au début le père Tomislav était toujours là, vrai guide particulier du groupe. C'est la Vierge elle-même qui a voulu la présence d'un prêtre, parce que nous étions des fillettes de 10-11 ans et que nous n'avions pas la moindre idée de la formation d'un groupe, de ce qu'il fallait faire, etc… Jelena a demandé pourquoi il fallait que ce soit un prêtre qui guide le groupe et la Vierge a répondu qu'un groupe sans prêtre est comme une classe sans maître, surtout au début. Le père Tomislav a donc accepté et il a tout organisé. Je crois qu'il est vraiment l'unique et authentique témoin de ce qui a eu lieu au début.
        
    ECHO : Donc vous étiez des fillettes, mais vous avez grandi. A quel point le "don" a-t-il influencé votre développement personnel ?
        
    MARIJANA : C'est une question qu'on nous pose souvent. Je dois dire que nous avons grandis avec ce don; tout était donc assez naturel. Nous avions le privilège que les familles ici à Medjugorje étaient toutes croyantes. La foi était déjà présente : on priait dans toutes les maisons. La Vierge a dit une fois aux voyants qu'elle avait choisi Medjugorje justement parce qu'elle y avait trouvé la foi. C'est pourquoi tout ce qui est arrivé ne nous a pas paru tellement étrange. Naturellement, avec les messages nous avions aussi compris que dans le passé, ce qui se vivait c'était plutôt une tradition qu'une vraie foi. Cependant c'était une bonne base d'où partir pour ensuite approfondir, comme pas suivant, la vie spirituelle.
    Quand même, ce n'est pas toujours facile. Pendant l'adolescence surtout, quand nous voyions nos amis libres de faire ce qu'ils voulaient, alors que nous devions être à la disposition des pèlerins et du groupe, etc… Peut-être bien que nous étions aussi un peu jalouses.
    Notre don était, bien entendu, un don, mais aussi un sacrifice.
    Il me reste cependant, comme un très beau souvenir que je n'échangerais pour rien au monde. En effet, plus qu'un don, il était une grande responsabilité, un peu comme celle des voyants qui, au nom de cette responsabilité de plus de 20 ans, ne jouissent plus d'une vie privée.
    Si nous acceptons les grands dons de Dieu, il faut aussi être prêts à donner tout ce qu'on attend de nous. Nous ne sommes que des instruments par lesquels Marie donne ses messages au monde. Et il faut le faire non seulement par les paroles, mais surtout par l'exemple.
    Ceci vaut également pour les pèlerins : ils ne doivent pas juger que leur pèlerinage est terminé quand ils quittent Medjugorje – la Vierge le leur dit dans un message – mais ils doivent continuer avec la prière et le jeûne afin que leur témoignage ne consiste pas seulement en des récits sur Medjugorje, mais transpire dans leur vie à travers les changements que le pèlerinage a opérés en eux.
        
    ECHO : Quelqu'un s'étonne que la Vierge répète toujours les mêmes choses; qu'en penses-tu ?
        
    MARIJANA : Ca nous étonne que la Vierge répète les mêmes choses, mais qui d'entre nous vit ce qu'elle nous dit ? Qui prie trois heures par jour comme elle a demandé ? Qui jeûne deux fois la semaine ? Presque personne ! La Mère de Dieu ne répète pas ses messages sans motif, mais seulement parce qu'elle veut que nous les réalisions concrètement. Si c'était le cas, elle ne répéterait plus, vous pensez bien !
        
    ECHO : Que dis-tu de la durée des apparitions ?
        
    MARIJANA : En regardant toutes ces années où la Mère de Dieu apparaît à Medjugorje, nous ne pouvons pas douter que nous sommes face à un très grand signe pour l'humanité. Parfois je pense qu'ici à Medjugorje, il pourrait bien arriver quelque chose de particulier pour le monde, quelque chose de nouveau : le monde commençant à vivre de façon nouvelle, en retournant à Dieu. Tout autour de soi, on entend que des choses négatives à la télé, dans les journaux, dans les conversations… Il ne se dit rien qui réjouisse. Le fait est que l'on parle tout le temps de choses qui sont loin de Dieu, surtout de choses matérielles. Il n'y a pas d'esprit, pas d'amour, pas de paix.
        
    ECHO : Tu veux dire que Medjugorje doit devenir un lieu où non seulement on prie, mais où on contemple Dieu ?
        
    MARIJANA : La Vierge, dans un message nous a dit : vous devez être conscients que Dieu est avec vous, est en vous, pas dans les nuages. Quand nous finirons par le comprendre et que nous commencerons à prier avec cette perspective, tout changera. Surtout au début de notre chemin. Marie nous invite à aller dans la nature et à découvrir comment là tout vient de Dieu.
    Et puis il faut se mettre à écrire ou à partager avec les autres ce que nous avons expérimenté à ce moment. Il ne s'agit naturellement pas "d'aller faire un tour" mais de nous immerger dans la création en pensant que Dieu l'a préparée pour que nous en jouissions et lui en rendions gloire.
        
    ECHO : La Vierge choisit la nature comme le lieu où apparaître; tu ne crois pas que ça veut dire quelque chose ?
        
    MARIJANA : J'en suis sûre. Elle nous répétait souvent que c'est très important de sentir Dieu dans le silence et la paix que l'on trouve dans la nature. Aujourd'hui cette dimension s'est perdue et c'est un des problèmes de l'humanité. Personne ne regarde autour de soi, on voit seulement ce qu'on a devant soi et on commence à courir à toute vitesse pour l'attraper. Il n'y a plus ni temps ni paix. On veut arriver à tout et on n'arrive à rien. C'est vraiment bête ! Et pour avoir quoi ? Des biens matériels qui vont rester là alors que l'on est destiné à s'en aller ailleurs !
    La Gospa tant de foi nous a rappelé que ce qui appartient à ce monde est passager : il ne faut jamais l'oublier : notre vie n'est qu'une préparation à l'éternité, à ce qui nous attend. Cessons donc de regarder ce que font les autres; s'ils veulent courir et accumuler du stress, qu'ils le fassent ! Mais nous ne devons pas perdre notre identité. L'homme n'est jamais content; plus il a, plus il pense qu'il n'a rien.
        
    ECHO : Comment finir cette interview ?
        
    MARIJANA : Avec les paroles d'un livre très curieux, que j'ai lu récemment. L'auteur a fait un rêve où il interviewait Dieu. Dans une première demande il veut savoir si Dieu a le temps de l'écouter. Dieu répond sans se faire attendre avec un sourire : Mon temps c'est l'éternité. Ensuite, l'hypothétique interviewer lui demande ce qui l'étonne le plus dans les hommes. Dieu répond : Ce qui me surprend, c'est le fait qu'ils soient toujours pressés; ils ne pensent pas au présent, mais à ce qui va arriver dans l'avenir et ainsi ils ne vivent ni le présent ni l'avenir. Et Dieu ajoute : N'est pas riche celui qui a plus, mais celui qui a besoin de moins. Mais ce qui m'étonne le plus chez les hommes c'est le fait qu'ils vivent comme s'ils ne devaient jamais mourir, et puis ils meurent comme s'ils n'avaient jamais vécu !